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L’exil, Vicente Blasco Ibáñez

et Fontana Rosa à Menton

 

par

Patrick ESTÈVE

Président du Cercle Blasco Ibàñez

 

Comme vous le savez peut-être, Blasco Ibáñez était un homme de convictions, un être infatigable d'une force et d'une vitalité hors normes.

 

C’est ainsi que d'homme de mouvement et de passions intérieures il est devenu un homme exilé, car en opposition frontale avec la monarchie et la religion en Espagne, un nomade en route vers d'autres mondes loin de son port d’attache sur la côte Est de l'Espagne.

 

Blasco Ibáñez est né le 29 janvier 1867 à Valence d’une famille de commerçants aisés dans une période où la ville du Cid était une ville riche, dynamique, ouverte et progressiste ; il est décédé à Menton le 28 janvier 1928 et ses cendres furent transférées dans sa ville natale en 1933 conformément à sa volonté de retourner un jour dans sa terre redevenue républicaine.

 

Blasco Ibáñez fit ses études secondaires avant de poursuivre brillamment un cursus d’avocat ; il se tourna très tôt vers la littérature, l’amour de la liberté, la défense des plus démunis et les idées républicaines auxquelles il resta fidèle jusqu’à sa mort.

 

Devenu journaliste et écrivain par choix et par engagement, Blasco Ibáñez fonda pas moins de sept journaux dont le célèbre El Pueblo (le Peuple) en même temps qu’un mouvement politique qui devint un parti républicain.

 

Il fut l’auteur de trente-deux romans, de différents récits historiques ou de voyages, de nouvelles, de contes, d’articles de Presse et fut élu six fois député aux Cortes de Madrid (l’équivalent de l’Assemblée Nationale) ; il se battit en duel à deux reprises contre des monarchistes, fut blessé, et faillit mourir dans un attentat.

 

L’écrivain fit également plus de six ans de prison en Espagne pour des délits politiques et fut condamné à quatorze ans de bagne dont il ne fit que quelques mois.

 

Vu l’étendue de son œuvre qualifiée de naturaliste, Blasco Ibáñez fut en lisse pour le Prix Nobel de littérature, mais il s’est soustrait du processus de désignation pour ne pas faire briller une Espagne monarchiste et dictatoriale celle d’Alphonse XIII et de Primo de Rivera. Il obtint et accepta avec dignité la Légion d’Honneur en France.

 

Blasco Ibáñez fut une personnalité passionnée, d’une grande modernité, et douée d’une véritable empathie pour autrui, dont l’ouverture sur le vaste monde n’avait d’égal que son engagement dans le cinéma naissant où il voyait une opportunité unique d’écrire une nouvelle forme de roman.

 

C’est pour cette raison qu’il porta à l’écran ses écrits les plus connus : des « Quatre cavaliers de l’Apocalypse » en passant par « Mare Nostrum » et « Arènes Sanglantes ». Avec le cinéaste Rex Ingram (des fameux cinémas REX), il participa à la création des studios de la Victorine à Nice.

 

Découvreur infatigable, Blasco Ibáñez entreprit de nombreux voyages en Europe et en Amérique Latine, plus particulièrement en Argentine où il créa deux colonies de peuplement : « Cervantes » en Patagonie et « Nueva Valencia » à Corrientes où il ambitionna d’aider les paysans pauvres de Valence en les faisant émigrer.

 

Blasco Ibáñez fut également l’ami d’écrivains, d’artistes et de politiciens du monde entier avec lesquels il entretenait une correspondance suivie dont Emile Zola, Rudyard Kipling, d'Annunzzio, Panait Istrati, Sorolla et des comédiens dont Elvire Popesco, Greta Garbo, Antonio Moreno et Rudolf Valentino qu’il découvrit avant lancer sa carrière.

 

Quand le roman « Les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse » connut un retentissement mondial, Blasco Ibáñez fut reçu triomphalement au Congrès américain et reçut le titre de Docteur Honoris Causa de l'Université de Washington en 1921.

 

À son retour, il séjourna à différents endroits de la Côte d’Azur, pour raisons de santé, avec Elena Ortuzar qu’il rencontra à la quarantaine : marié et père de quatre enfants, son mariage s’était abîmé dans les séjours en prison, les périodes d’exil, les voyages et les multiples aventures amoureuses.

 

Blasco Ibáñez appréciait Nice et le quartier de Cimiez où une rue lui est dédiée, et il affectionnait également Monte Carlo jusqu'à ce qu'une visite au Maire de Menton, Monsieur Fontana, lui fit découvrir la baie de Garavan et la propriété de Fontana Rosa. qui avait été saisie à un Allemand durant la Grande Guerre, pour laquelle Blasco Ibáñez eut un coup de cœur à cause des orangers qui lui rappelèrent l’Espagne et Valence.

 

L’exilé qu’il était acheta sans tarder Fontana Rosa le 25 août 1921 et s’installa définitivement à Menton pour faire de la propriété un « jardin des romanciers » luxuriant, ponctué de fontaines et de statues des grands écrivains que Blasco Ibáñez admirait.

 

Il voulait tout comme Goethe : « Vivre, aimer, mourir ».

 

« Mon jardin est un instrument de travail, disait Blasco Ibáñez, le premier de tous. Dans un hôtel particulier à Paris, je ne pourrais pas écrire comme je l’ai fait ici sans fatigue accablante. Je me fatigue énormément, puisque je ne suis pas en acier, mais l’ambiance saine, douce et poétique qui m’entoure rétablit immédiatement mes forces, réveille mon énergie pour continuer à avancer pour réaliser cet immense labeur sans affaiblir ma santé ».

 

On peut dire que Blasco Ibáñez vécut en exil à Menton dans des conditions similaires à celles de Voltaire à Ferney (FR) ou de Victor Hugo à Guernesey (GB).

 

La propriété Fontana Rosa fut le port d’attache définitif de Blasco Ibáñez qui trouva tout de même le temps de faire un tour du monde en bateau sur le Franconia.

 

À Menton, nombre de familles ont gardé le souvenir de Blasco Ibáñez et on ne compte plus les témoignages d’anciens « jeunes Mentonnais » qui ont pénétré à Fontana Rosa avant sa restauration pour y vivre des moments fantastiques.

 

La force de l’esprit de l’écrivain semble encore s’y promener…

 

En attendant de vous y rendre, après le déconfinement lors des Journées Européennes du Patrimoine de septembre prochain, vous pouvez consulter le site Internet du Cercle Blasco Ibàñez de Menton www.blascoibanez.fr ou la Page du Cercle sur Facebook.

 

Je vous dis à bientôt à Fontana Rosa pour une nouvelle édition du Festival du Livre d’Occasion et la remise 2020 des Prix du concours de la nouvelle pour lycéens : ce sera le troisième week-end de septembre.

 

Sentiments Blasquistes

 

Patrick ESTÈVE

L'exil, Vicente Blasco Ibàñez et Fontana Rosa à Menton
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