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"Frédéric LEFEVRE (1889-1949) romancier, essayiste, critique littéraire et co-fondateur avec Maurice MARTIN DU GARD et Jacques GUENNE des « Nouvelles littéraires » dont il fut le rédacteur en chef de 1922 à 1949 publia dans cet hebdomadaire une chronique intitulée « Une heure avec … » qui constitua à l’époque un concept tout à fait nouveau au service de la connaissance intime des auteurs par leurs lecteurs.

C’est à l’hôtel Lutetia à Paris où Vicente BLASCO IBANEZ avait pour habitude de retenir un appartement pour y recevoir ses amis, ses éditeurs, les journalistes que Frédéric LEFEVRE rencontra le romancier espagnol.

Au cours de cette « Heure avec » publiée le 13 décembre 1925, BLASCO IBANEZ y exprime son gout immodéré pour la lecture : « Je lis au minimum quatre heures par jour. Mais souvent je lis toute la journée. A Menton, j’ai déjà une bibliothèque de douze à quatorze mille volumes » et son admiration pour Victor Hugo ; il y déroule également l’histoire de sa vie et de ses engagements politiques « le meilleur de mes romans » indique t-il à son interlocuteur. Au cours de cette vie aux multiples combats, l’intermède argentin va lui permettre d’assouvir ce désir d’action qui le caractérise ; laissons le nous le conter :

« En 1909, j’ai fait une tournée de conférences en République Argentine avec Anatole France. Une amitié s’établit alors entre nous qui ne s’est jamais démentie.

Il se trouvait que j’étais le premier écrivain espagnol qui venait renouer les relations intellectuelles entre l’Amérique du Sud et une nation qu’elle considère toujours comme la Mère patrie. Aussi quand je débarquai à Buenos-Aires, 80 000 personnes m’attendaient et m’accompagnèrent depuis le navire jusqu’à mon domicile.

Anatole France aimait à me rappeler cet accueil qu’il qualifiait de triomphal. L’affluence était telle que la voiture qui me conduisait se brisa sous la pression de la masse et qu’un peloton de cavalerie dut m’ouvrir le chemin de l’hôtel.

Ma tournée de conférences dura neuf mois et je restai ensuite là-bas comme défricheur de terres et colonisateur.

Je m’installai en Patagonie et fondait la colonie Cervantès.

Quelque temps après, je fondai une autre colonie de plus de 5 000 hectares. En hommage à ma ville natale, j’appelai cette nouvelle colonie : Nueva Valencia. La distance qui séparait Nueva Valencia de la colonie Cervantès était plus grande que celle qui sépare Paris de Petrograd.

Après beaucoup d’aventures, grugé par tout le monde, je dus vendre mes colonies et, en juillet 1914, je revins à Paris. »

Ainsi BLASCO IBANEZ avait-il connu l’échec, échec argentin qui signifiait cependant son retour en littérature. N’a-t-il pas confié bien plus tard à Camille PITOLLET (1874-1964) auteur de « Blasco Ibanez, ses romans et le roman de sa vie » en 1921, la réflexion suivante :

« J’ai eu honte de ma situation, je ne pouvais admettre ce renoncement définitif à la littérature, cet enlisement progressif dans la rusticité béotienne des colonisateurs … Non non il fallait en finir ».

"

Copyright Jean-Pierre Frediani (Cercle Blasco Ibañez) août 2013.

L’aventure argentine de Vicente Blasco Ibañez
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